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Nutrition

DMLA: le gras accélère la perte de vue

Une étude datant de 2016, réalisée à l’Université de Montréal, montre qu’un excès de gras dans le sang dérègle le métabolisme des cellules de la rétine et favorise la dégénérescence maculaire liée à l’âge, principale cause de cécité dans le monde.

Hélène Leroy

La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est la principale cause de perte de vision en Occident, pouvant affecter jusqu’à 35 % des personnes de 75 ans et plus. Le centre de la rétine, qu’on appelle la macula, est très riche en photorécepteurs, les cellules hyperspécialisées qui captent la lumière et nous permettent de percevoir les détails et les couleurs du monde qui nous entoure.

Au cours de la dégénérescence maculaire, ces cellules cessent progressivement de fonctionner et il y a alors détérioration graduelle de la vision: difficulté à lire ou à voir de loin, distorsions visuelles (lignes droites qui deviennent courbées), difficulté à distinguer les couleurs et, ultimement, apparition d’une tache sombre au centre de la vision.

Dans certains cas, la DMLA s’accompagne d’une vascularisation sous la rétine et ces nouveaux vaisseaux aggravent considérablement les problèmes de vision des personnes atteintes. Formés par le processus d’angiogenèse, ces vaisseaux sont en effet très fragiles et laissent filtrer du sang vers la rétine, ce qui peut endommager de façon irréversible les photorécepteurs et mener à une cécité complète.

La rétine, un dispositif sophistiqué et fragile

Quel est le signal qui provoque la formation de ces nouveaux vaisseaux sanguins? Puisque les photorécepteurs situés dans la macula sont des cellules très actives qui consomment une grande quantité d’oxygène, on peut supposer que la néovascularisation a pour but d’acheminer à ces cellules les nutriments essentiels à leurs fonctions. La DMLA serait donc à la base un problème de dérèglement énergétique au niveau des photorécepteurs.

Pour explorer cette possibilité, une équipe menée par des scientifiques de l’Université de Montréal et de l’Université McGill a étudié en détail le métabolisme des cellules de la rétine et examiné son influence sur la production de VEGF, un facteur de croissance responsable de la formation de nouveaux vaisseaux sanguins par le processus d’angiogenèse. Ils ont tout d’abord fait l’étonnante découverte que les photorécepteurs n’utilisent pas seulement du sucre pour combler leurs besoins énergétiques, comme on le croyait jusqu’à présent, mais aussi les gras présents dans la circulation sanguine. Est-ce qu’un déséquilibre du métabolisme de ces gras pourrait expliquer la hausse de vascularisation observée dans lesformes plus graves de DMLA?

Un processus naturel qui se retourne contre nous

Il semble que oui. Grâce à une série d’expériences, les scientifiques ont en effet réussi à montrer que les photorécepteurs exprimaient à leur surface une espèce de «senseur», capable de détecter les niveaux de gras présents dans la circulation. Ce mécanisme s’est élaboré au fil de l’évolution pour optimiser l’apport en énergie de la cellule et faire en sorte qu’on puisse conserver une bonne vision, même en période de famine (bien voir est essentiel pour trouver de la nourriture!).

Ce système ne fonctionne cependant pas bien lorsque ces niveaux de gras sont élevés: le senseur croit qu’il y a surabondance de nourriture et cherche à protéger la cellule d’un excès d’énergie, par exemple en l’empêchant d’absorber du sucre. Confronté à cette carence, le photorécepteur «crie à l’aide» et sécrète du VEGF pour attirer vers lui de nouveaux vaisseaux sanguins capables de lui apporter l’énergie requise.

En d’autres termes, l’invasion de la rétine par des vaisseaux sanguins est une tentative désespérée des photorécepteurs de subvenir à leurs besoins énergétiques en gras et en sucre, ce qui cause malheureusement des dégâts irréversibles au tissu et une perte de la vision. Ces observations sont très importantes et pourraient notamment expliquer pourquoi les dyslipidémies (trop de gras dans le sang) sont un important facteur de risque de DMLA accompagnée de néovascularisation.

Prévenir la DMLA grâce à l’alimentation

À la lumière des résultats de cette étude, il est certain que l’adoption d’habitudes de vie qui diminuent ces gras sanguins peut avoir des effets positifs sur le développement de la DMLA.

Une approche intéressante est de remplacer les aliments industriels (qui sont bien souvent la principale source de gras et de sucre de notre alimentation) par des végétaux: non seulement c’est meilleur pour la santé en général, mais plusieurs études ont suggéré que des composés phytochimiques comme les caroténoïdes et les polyphénols présents dans plusieurs fruits et légumes, comme les légumes verts ou encore les petits fruits, réduisent de façon significative le risque de DMLA.

Source

Joyal JS et coll. Retinal lipid and glucose metabolism dictates angiogenesis through the lipid sensor Ffar1. Nature Med, 2016; 22: 439-45.

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