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Médecine douce

Le foetus aide la cicatrisation des plaies de sa mère

Hélène Leroy

Au cours de la grossesse, le fœtus relâche des cellules qui traversent le placenta, survivent et s’intègrent dans la moelle osseuse de la mère. Des résultats récents suggèrent que ces cellules fœtales accélèrent la cicatrisation des blessures de la mère, même après la naissance. Un beau cadeau du bébé à sa maman.

Chez les animaux euthériens (à placenta) comme nous les humains, le sang de la mère communique directement avec la circulation fœtale pour apporter l’oxygène et les nutriments essentiels à son développement. Cette communication intime mère-enfant n’est cependant pas à sens unique : tout au long de la grossesse, quelques cellules provenant du fœtus atteignent la circulation maternelle et peuvent s’implanter dans le corps de la mère, en particulier au niveau de la moelle osseuse, où elles peuvent demeurer dans un état latent pendant plusieurs décennies. Ce phénomène, appelé microchimérisme, fait en sorte que les mères possèdent un réservoir de cellules souches, non différenciées, et qui sont bien tolérées par le système immunitaire, car elles expriment un mélange moitié-moitié de protéines d’origine maternelle et paternelle à leur surface.

Une des caractéristiques les plus importantes des cellules souches est qu’elles sont très polyvalentes et peuvent former une panoplie de cellules différentes. C’est effectivement le cas pour les cellules fœtales microchimériques, car plusieurs études ont montré que ces cellules peuvent être recrutées vers divers organes où elles se transforment en cellules spécialisées (neurones, hépatocytes, entérocytes) capables de remplacer celles qui ont été endommagées. Ce phénomène est particulièrement mis en évidence lors de la réparation des plaies cutanées à la suite d’une blessure. Pour remplacer les cellules qui ont été détruites, les cellules souches présentes dans les couches profondes de la peau se divisent et migrent vers la lésion pour former un nouveau tissu sain qui va colmater la brèche. Ce processus requiert toutefois la formation d’un nouveau réseau de vaisseaux sanguins par angiogenèse pour apporter à ces nouvelles cellules l’oxygène et les nutriments nécessaires à leurs fonctions. Et c’est là que les cellules fœtales entrent en jeu : le groupe du professeur Selim Aractingi (Paris) a montré que les cellules fœtales sont présentes au niveau des blessures de la mère, autant avant qu’après l’accouchement, et que ces cellules possédaient la capacité de former des vaisseaux sanguins qui contribuent à la réparation de la blessure.

Les travaux de la même équipe, récemment publiés dans la prestigieuse revue Nature Communications, permettent de mieux comprendre les mécanismes en cause et pourraient permettre d’utiliser cette propriété des cellules souches fœtales à des fins thérapeutiques. En isolant spécifiquement les cellules fœtales impliquées dans la cicatrisation, les chercheurs ont découvert que ces cellules possédaient la caractéristique d’exprimer de fortes quantités d’un récepteur appelé Ccr2 à leur surface. Ils ont aussi observé que l’activation de ce récepteur par une protéine (Ccl2) améliorait grandement la cicatrisation, chez les femelles qui étaient enceintes ou qui avaient donné naissance, indiquant que c’est le recrutement des cellules fœtales qui était responsable de ce processus. Selon les auteurs, l’injection de Ccl2 pour mobiliser les cellules fœtales pourrait ouvrir la voie à une nouvelle approche pour le traitement des plaies cutanées chroniques, comme celles associées au diabète, par exemple.

La relation mère-enfant n’est donc pas à sens unique comme on le croit souvent. Il s’agit plutôt d’une forme d’échange, dans lequel le fœtus contribue au réservoir de cellules souches de la mère en échange d’un apport en nourriture. Qui a dit que les enfants étaient égoïstes ?

Source

Castela M et coll. Ccl2/Ccr2 signalling recruits a distinct fetal microchimeric population that rescues delayed maternal wound healing. Nat Commun.

Presse santé

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