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Pourquoi adore t-on avoir peur? Quand la science se penche sur les films d’horreur

Marie Desange

Vous êtes peut-être un fan inconditionnel. Ou peut-être ne pouvez-vous pas vous imaginer vous soumettre volontairement à deux heures de tension. Ou enfin, peut-être êtes vous quelque part entre les deux. Vous regardez des films d’horreur entre vos doigts et sautez à chaque fois que vous avez peur, mais vous les aimez quand même. Devinez quoi : ce n’est pas seulement que vous avez un goût bizarre pour les films. Il y a des raisons à la fois physiologiques et psychologiques derrière le désir de la peur et de l’effroi.

Une (très) brève histoire de sensations fortes et de frissons

L’horreur nous accompagne depuis les tout débuts de la culture écrite. On peut citer les tragédies grecques classiques, avec toute leur violence, leur chaos et leur caractère sanglant, comme l’un des premiers exemples de fiction d’horreur. Plus récemment, mais avant que les films d’horreur ne soient une réalisés, les gens ont afflué pour vivre des expériences telles que les montagnes russes. La popularité de ces expériences reflète le désir du public d’être effrayé. Mais seulement tant que ces frissons sont bien encadrés comme un divertissement.

Mode combat ou mode fuite : Le secret d’un amour de l’horreur ?

De toute évidence, l’idée de participer volontairement à des choses qui vous font peur n’est pas nouvelle. La seule chose qui a changé, c’est le support d eta peur. Les films et autres médias. Aujourd’hui,l a plupart du temps, nous obtenons nos qualité de peur à partir de films d’horreur. En 2020, le genre de l’horreur détenait près de 10 % des parts de marché du box-office.
Alors, qu’est-ce qui fait que le public trouve l’horreur si attirante ? C’est en partie une question de physiologie. Nous avons tous entendu parler de notre mode « combat ou fuite ». Dans lequel le système nerveux sympathique réagit à une menace perçue. Cee phénomène est la réaction de notre corps qui nous met en mode « fuite ». Regarder un film d’horreur peut déclencher cette réaction, car vous percevez une menace plus rapidement que vous ne pouvez distinguer si elle est réelle ou imaginaire.

Cette réaction involontaire peut avoir un effet majeur sur votre corps. En lui faisant libérer de l’adrénaline. Les effets de cette montée, comprennent « une respiration accrue, un rythme cardiaque plus rapide, la transpiration. Ces changements physiologiques augmentent l’apport d’oxygène à notre cerveau et à nos muscles. Du point de vue de la survie, ces effets améliorent les performances verbales et cognitives. Vous donnant le coup de fouet mental dont vous avez besoin pour trouver la sortie d’une situation effrayante.
Le mode « combat ou part » peut également entraîner la libération d’une foule de substances chimiques, comme des neurotransmetteurs et des hormones, qui font passer notre métabolisme à la vitesse supérieure ».

Endorphine, morphine: l’horreur déclenche des tempêtes dans le cerveau

Un exemple de ces substances chimiques est l’endorphine. Un analgésique que votre corps produit naturellement et dont les effets bénéfiques ont été comparés à ceux de la morphine. Ces endorphines sont des bloqueurs de douleur. Donc même si nous nous blessons, nous ne le ressentirons pas aussi intensément. La production de cette substance chimique par votre corps peut être causée par l’exercice, le stress émotionnel, la douleur, l’orgasme, voire la consommation de nourriture épicée et de chocolat. Regarder un film vraiment terrifiant peut déclencher le même effet.

La dopamine est une autre substance chimique que vous pouvez vous attendre à rencontrer dans une situation effrayante. La dopamine est un neurotransmetteur qui transmet des messages à travers différentes parties du corps. Elle procure des sensations agréables semblables à celles que procurent les endorphines. Une étude publiée en juin 2018 dans la revue Nature Communications suggère qu’avec le temps, l’exposition à la dopamine peut en fait diminuer notre réaction globale à la peur.

Tout est dans la tête : votre cerveau aime l’horreur

Alors si c’est ce qui se passe dans notre corps quand nous avons peur, que se passe-t-il dans notre tête ? Votre cerveau a beaucoup de choses à traiter dans une situation effrayante. Nous commençons à évaluer la menace. Ai-je déjà vu ceci ou quelque chose de semblable auparavant ? Que s’est-il passé quand j’ai vu ça ? Comment les gens autour de moi réagissent-ils ?

Mais c’est là que les choses commencent à différer entre une menace réelle et une menace perçue. Lorsque vous regardez un film, au fond de vous, vous réalisez toujours que ce n’est qu’un film. Donc même si vous percevez une situation objectivement effrayante, vous profitez des effets agréables des endorphines et de l’oxygène accru dans votre cerveau sans qu’aucune menace réelle immédiate ne soit présente.

Si vous aimez les films d’horreur, alors vous vous installez confortablement, et vous appréciez la peur comme vous appréciez les montagnes russes. Si la menace était réelle, vous feriez le même genre de chose. Mais vous n’apprécieriez pas l’expérience dans la plupart des cas. Lorsque nous savons que la menace n’est pas réelle, il est amusant de se lancer des défis pour voir si nous pouvons y faire face.

Quand l’horreur nous aide à questionner le monde, nos valeurs la société

Il existe également un type très spécifique de stimulation mentale qui peut provenir du fait de regarder des choses qui vous font peur. Si l’horreur nous ramène à notre corps, c’est aussi une forme très intellectuelle. Elle nous pose des questions très sérieuses sur:
-la fonction sociale de la violence
-les abominations de l’inégalité sociale et économique
– vos états d’âme,
– votre place dans l’univers
– le problème de l’existence du mal dans un monde censé être régi par une divinité bienveillante.

Ce sont là quelques-unes des questions les plus graves auxquelles nous sommes confrontés. Elles seront pourtant familières à tout lecteur ou spectateur de l’horreur.

Beaucoup d’entre nous apprécient également l’horreur comme une critique de la société. Les choses que nous voyons dans les films d’horreur sont souvent un reflet de notre monde et de nous-mêmes. Cela nous permet d’explorer des thèmes plus larges à travers le filtre socialement acceptable des choses qui se bousculent dans nos têtes la nuit.
Essayez de regarder « Dawn of the Dead » comme une critique du « consumérisme effréné »,The Babadook comme une histoire sur la répression du deuil. Une fois que vous avez réalisé que presque tous les films d’horreur ont quelque chose à dire sur la société, regarder l’horreur devient une façon utile (et peut-être même plus effrayante) d’exorciser nos démons.

L’horreur peut aussi être vu comme un moyen d’autostimulation mentale. Suggérant qu’aborder de nouvelles expériences effrayantes avec une attitude de curiosité, d’exploration et de défi personnel peut être un excellent moyen de gérer le stress et d’améliorer les capacités de résolution des problèmes. Il est normal d’être intrigué par des choses qui nous font peur. L’horreur nous permet d’affronter nos peurs à distance.

Source

Ray Luo, Akira Uematsu,: A dopaminergic switch for fear to safety transitions. Nature Communications volume 9, Article number: 2483 (2018)

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