Sinusite chronique : pourquoi certaines personnes y échappent et d’autres pas

Alors que certaines personnes sont régulièrement affectées par des sinusites, d’autres ne sont pratiquement jamais touchées par ces infections. Cette résistance chez certaines personnes serait due à l’action des récepteurs à l’amertume présents au niveau des voies respiratoires.

Plusieurs substances dangereuses pour la santé ont pour caractéristique commune d’être très amères. Pour protéger l’organisme de l’impact néfaste de ces substances, les récepteurs du goût présents sur la langue contiennent plusieurs récepteurs spécialisés dans la détection de l’amertume : dès que la molécule amère se mélange à la salive, elle est captée par ces récepteurs et un message nerveux est immédiatement envoyé au cerveau pour déclencher une réaction instinctive de rejet.

L’importance de ce mécanisme pour la survie est bien illustrée par le nombre et l’efficacité des récepteurs à l’amertume : par exemple, alors que la détection du sucre ne fait intervenir que 2 récepteurs, au moins 50 récepteurs distincts perçoivent l’amertume, et ce, de façon 1000 fois plus sensible que le sucre!

 

Curieusement, il existe des variations génétiques interindividuelles qui rendent certaines personnes encore plus sensibles à l’amertume; par exemple, les personnes qui possèdent une version modifiée de certains récepteurs (appelés T2R38) sont beaucoup plus sensibles à cette saveur. La raison de cette diversité demeure inconnue, mais certains spécialistes pensent qu’elle pourrait signifier que ces récepteurs possèdent d’autres fonctions que la détection du goût amer.

En première ligne contre les agents pathogènes

Une percée majeure en ce sens provient de l’observation que les récepteurs à l’amertume sont également présents à la surface des cellules qui tapissent les voies respiratoires supérieures (nez et sinus). Cette localisation est de prime abord surprenante, car le rôle de la muqueuse respiratoire est d’agir comme première ligne de défense contre les pathogènes présents dans l’air que nous respirons : ces cellules sécrètent un mucus qui permet d’enrober les substances étrangères et elles possèdent aussi à leur surface des cils qui créent un mouvement permettant de transporter les particules vers le pharynx, où elles sont avalées ou éliminées par expectoration. En parallèle, le battement des cils provoque la formation de monoxyde d’azote, un gaz doté de propriétés antimicrobiennes qui «désinfecte» les voies respiratoires.

Etre sensible à l’amertume est un très bon signe

Les récepteurs à l’amertume participeraient à ce mécanisme de défense en détectant certaines substances amères sécrétées par les bactéries présentes dans les voies respiratoires. Les expériences ont montré que la production de ces composés (lactones sesquiterpéniques) par le pathogène respiratoire Pseudomonas aeruginosa activait le récepteur T2R38, ce qui entraînait une augmentation de la fréquence de battement des cils chargés de l’élimination des particules ainsi qu’une hausse de la production de monoxyde d’azote par la muqueuse. Les chercheurs ont également observé que l’efficacité de ce mécanisme diffère grandement selon le type de récepteur T2R38 qui est présent dans la muqueuse et qui varie d’une personne à l’autre.

Ainsi, les sinus des personnes qui possèdent la version la plus active de ce récepteur (et donc qui sont donc plus sensibles au goût amer) étaient totalement dépourvus de pathogènes, alors que ceux des personnes dont le récepteur est moins actif sont beaucoup plus à risque d’être infectés et de développer des sinusites.

La plus grande vulnérabilité de certaines personnes face à des infections respiratoires serait donc causée, au moins en partie, par des variations de certains récepteurs à l’amertume. L’identification de facteurs pouvant améliorer l’activité de ces récepteurs pourrait donc représenter une nouvelle avenue pour le traitement de ces infections, en particulier les sinusites chroniques.

Source

Lee RJ et coll. T2R38 taste receptor polymorphisms underlie susceptibility to upper respiratory infection. J. Clin. Invest. 122: 4145-59.

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Hélène Leroy
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