Parkinson et constipation: l’origine de la maladie pourrait bien être dans les intestins
De nouvelles recherches suggèrent que la maladie de Parkinson pourrait commencer dans l'intestin. Avec comme signe la constipation.

La maladie de Parkinson n’attaque pas uniquement les circuits moteurs du cerveau. Des signaux précoces dans l’appareil digestif, constipation, douleurs abdominales, ralentissement du transit, orientent de plus en plus la recherche vers l’intestin. Une équipe du Columbia University Irving Medical Center a publié dans Neuron une étude expérimentale qui renforce cette hypothèse, en montrant chez la souris que l’exposition à l’alpha synucléine peut déclencher des troubles intestinaux durables chez des animaux porteurs d’un gène humain associé à la maladie. Cette avancée nourrit un changement de regard, l’axe intestin cerveau pourrait participer dès l’amorce de la pathologie et offrir de nouvelles pistes de prévention et de traitement. Pour un éclairage plus large sur le rôle de l’alimentation et de la flore digestive, voir alimentation et santé intestinale.
Les liens entre Parkinson et changements intestinaux
Des symptômes digestifs longtemps en amont. Bien avant les tremblements, la rigidité ou les troubles de la marche, de nombreuses personnes rapportent des troubles digestifs persistants. La constipation figure parmi les signes les plus fréquents, parfois jusqu’à vingt années avant les symptômes moteurs, selon des travaux cliniques rapportés dans la littérature spécialisée. Ces indices soutiennent l’idée d’une phase prodromique où l’intestin devient une zone d’alerte, voir aussi symptômes gastro intestinaux.
Une signature biologique commune. L’alpha synucléine, protéine qui s’agrège de façon anormale dans le cerveau des patients, apparaît également dans les tissus entériques chez certains malades. Des biopsies rectales et coliques ont montré des dépôts de cette protéine mal repliée dans le système nerveux entérique, ce qui nourrit l’hypothèse d’une origine intestinale pour une partie des cas, hypothèse dite de Braak souvent discutée dans les congrès de neurologie.
Ce que montre l’étude expérimentale publiée dans Neuron
Un modèle qui rapproche le laboratoire du réel. Dans l’étude citée, des chercheurs ont injecté de l’alpha synucléine à deux groupes de souris, des animaux ordinaires et des souris modifiées pour exprimer des facteurs génétiques humains liés à la maladie. Les souris génétiquement modifiées ont présenté des troubles intestinaux marqués, notamment une constipation persistante et des lésions des neurones de l’intestin, alors que les souris témoins sont revenues plus rapidement à la normale. Les auteurs n’ont pas observé de modification évidente dans le cerveau au moment de l’évaluation, ce qui focalise l’attention sur la phase périphérique de la pathologie, Neuron, 2023.
Un faisceau d’arguments en faveur du rôle immunitaire. Les chercheurs évoquent aussi une activation d’éléments immunitaires, observée chez des patients par d’autres équipes, avec des cellules prêtes à attaquer des neurones contenant de l’alpha synucléine mal repliée. La mise en évidence d’une réaction immunitaire locale dans l’intestin des modèles animaux renforce l’idée d’une participation conjointe de l’immunité et de la barrière intestinale aux premières étapes de la maladie.
Pourquoi c’est important. Ces résultats n’établissent pas que tous les cas de Parkinson débutent dans l’intestin. Ils suggèrent cependant que, chez des sujets génétiquement vulnérables, un événement périphérique pourrait enclencher une cascade pathologique. Cette piste ouvre des options thérapeutiques nouvelles, agir tôt sur l’inflammation intestinale, sur la perméabilité de la muqueuse et sur le microbiote.
Constipation et autres signes prodromiques, à prendre au sérieux
Un tableau clinique plus large. Au delà du transit ralenti, les phases initiales peuvent associer troubles du comportement en sommeil paradoxal, anxiété, dépression, diminution de l’odorat et douleurs inexpliquées. Repérer cet ensemble dans le temps long aide à orienter les familles et les soignants vers une évaluation spécialisée. La constipation reste un marqueur accessible, souvent négligé, alors qu’elle peut précéder de nombreuses années la plainte motrice, comme le rappellent des cohortes cliniques.
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Pourquoi l’intestin se dérègle. Le système nerveux entérique, parfois qualifié de deuxième cerveau, orchestre le péristaltisme, la sécrétion digestive et la coordination avec le système immunitaire muqueux. Si des agrégats d’alpha synucléine ou une inflammation locale perturbent ces circuits, le transit ralentit, la sensibilité viscérale change et des douleurs diffuses apparaissent. Les observations chez la souris de l’étude précitée apportent un soutien expérimental à ce mécanisme plausible.
Alpha synucléine, le point de jonction entre intestin et cerveau
Une protéine clé qui devient toxique. L’alpha synucléine joue un rôle normal dans la transmission synaptique. En se repliant de manière anormale, elle forme des agrégats qui endommagent les neurones. Les données accumulées montrent que ces agrégats peuvent se propager de cellule en cellule. Plusieurs équipes explorent l’idée d’une propagation ascendante, du système nerveux entérique vers le cerveau via le nerf vague, une voie anatomique directe entre intestin et centres cérébraux.
Le système immunitaire comme amplificateur. En présence d’alpha synucléine mal repliée, des cellules immunitaires peuvent s’activer, libérer des médiateurs inflammatoires et fragiliser davantage la barrière intestinale. Cette boucle d’entretien, inflammation et perméabilité accrues, favoriserait l’exposition du système nerveux entérique à des signaux de danger répétés. La publication dans Neuron avance des éléments en ce sens au sein du modèle animal étudié.
Microbiote intestinal, alimentation et progression de la maladie
Un écologie interne qui compte. Plusieurs études rapportent des différences de composition du microbiote chez les personnes avec Parkinson par rapport à des témoins sains. La diversité bactérienne et la présence de certaines espèces productrices d’acides gras à chaîne courte peuvent influencer l’inflammation de bas grade et l’intégrité de la muqueuse. C’est pourquoi les approches nutritionnelles et le soin porté à la santé digestive entrent dans le champ des recherches actuelles, voir alimentation et santé intestinale.
Des pistes concrètes en discussion. Sans promettre de prévention totale, un régime riche en végétaux variés, fibres et polyphénols, des graisses de qualité et une réduction des ultra transformations s’alignent avec les recommandations de santé publique et soutiennent la barrière intestinale. Des essais évaluent aussi des probiotiques ciblés ou des interventions diététiques structurées pour moduler des symptômes digestifs et la qualité de vie, avec des résultats encore hétérogènes selon les protocoles publiés.
Ce que les chercheurs ont observé chez la souris après injection d’alpha synucléine
Des effets digestifs sélectifs et persistants. Dans le protocole, toutes les souris ont été brièvement malades après l’injection. Seules celles portant le gène humain associé à la maladie ont présenté une perte de poids transitoire suivie d’un ralentissement majeur du transit, signe d’une constipation durable. Les souris ordinaires sont revenues à l’état basal. L’étude n’a pas mis en évidence de changement cérébral à ce stade du suivi, mais a objectivé des dommages au niveau de l’innervation intestinale, Neuron, 2023.
Une sensibilité liée à la vulnérabilité génétique. Ce contraste suggère qu’un terrain génétique de risque peut transformer un stimulus périphérique identique en trajectoire pathologique chez certains individus. Ce principe de susceptibilité ouvre la voie à des stratégies de médecine personnalisée, qui combinent génétique, microbiote et marqueurs immunitaires pour anticiper le risque.
Vers de nouvelles stratégies de dépistage et de traitement
Dépister plus tôt pour intervenir mieux. Si l’intestin révèle des altérations précoces, la détection de dépôts d’alpha synucléine dans des biopsies digestives ou l’identification de profils microbiens associés au risque pourraient compléter le tableau de dépistage des populations à surveiller. Des approches de type panel de biomarqueurs sanguins et fécaux sont également explorées. Le dépistage précoce de Parkinson via l’observation de lésions intestinales fait partie des axes discutés par les équipes de recherche.
Traiter la périphérie autant que le centre. Les traitements actuels ciblent surtout les symptômes moteurs au niveau cérébral. Compléter l’arsenal par des stratégies qui réduisent l’inflammation intestinale, renforcent la barrière muqueuse et modulent le microbiote pourrait, à terme, ralentir la progression ou améliorer certains symptômes non moteurs. Des immunomodulateurs spécifiques et des recommandations alimentaires personnalisées font l’objet d’investigations.
Questions fréquentes sur l’axe intestin cerveau dans Parkinson
Ce modèle animal prouve t il que Parkinson commence dans l’intestin chez l’humain
Ce n’est pas une preuve absolue. L’étude renforce une hypothèse plausible pour un sous groupe de patients, mais la maladie reste hétérogène. Plusieurs voies d’initiation peuvent coexister. Le mérite du travail publié dans Neuron est de documenter, pas à pas, un mécanisme intestinal crédible chez des souris vulnérables.
Faut il dépister systématiquement la constipation pour prédire la maladie
La constipation n’est pas spécifique. C’est un signal utile à replacer dans un ensemble, troubles du sommeil paradoxal, hyposmie, anxiété, antécédents familiaux. Sa présence au long cours chez une personne à risque justifie une discussion avec le médecin pour un suivi adapté.
Le microbiote peut il expliquer toutes les formes de Parkinson
Il contribue probablement chez certains patients, sans rendre compte de toutes les trajectoires. Sa modulation se conçoit comme un levier complémentaire, associé aux traitements neurologiques standard et à une hygiène de vie favorable.
Conseils pratiques pour prendre soin de l’intestin quand on vit avec Parkinson
Agir sur les leviers quotidiens. En accord avec l’équipe soignante, il est possible de structurer des routines favorables au transit et à la muqueuse intestinale. Ces gestes n’ont pas vocation à remplacer les traitements, ils complètent la prise en charge et peuvent améliorer le confort digestif.
- Alimentation, viser une grande variété végétale, légumineuses bien tolérées, céréales complètes, fruits et légumes, graisses de qualité, et un apport hydrique suffisant réparti sur la journée. Ajuster les fibres selon la tolérance individuelle et la médication.
- Rythme, préserver des horaires réguliers de repas et de sommeil, deux synchroniseurs clés de l’axe intestin cerveau.
- Activité physique, pratiquer une activité adaptée et régulière pour stimuler le péristaltisme et l’humeur, en cohérence avec les conseils médicaux.
- Médicaments, revoir avec le médecin les traitements qui constipent, opiacés ou anticholinergiques par exemple, afin d’anticiper des stratégies de prévention du ralentissement du transit.
- Suivi, tenir un carnet des symptômes digestifs et moteurs, utile pour ajuster la prise en charge et repérer les interactions possibles entre alimentation, microbiote et traitement.
Perspectives de recherche, ce qui pourrait changer demain
Des biomarqueurs combinés. L’avenir proche pourrait voir l’émergence de signatures multi paramètres, peptides d’alpha synucléine circulants, cytokines inflammatoires, profils microbiens, tests de perméabilité intestinale, pour mieux stratifier les risques et personnaliser les interventions.
Des essais cliniques à double entrée. Au delà des approches dopaminergiques, des protocoles testent des probiotiques de nouvelle génération, des fibres spécifiques, des anti inflammatoires ciblant la muqueuse et des immunomodulateurs. Leur objectif n’est pas seulement symptomatique, il s’agit d’évaluer un possible impact sur la trajectoire de la maladie.
Une prévention plus précoce. Si l’on confirme que des lésions intestinales et des réponses immunitaires anormales précèdent les atteintes cérébrales, une fenêtre d’intervention s’ouvrira pour retarder, voire atténuer, l’installation du processus neurodégénératif chez des sujets à haut risque.
Le mot de la rédaction
La piste intestinale de Parkinson franchit une nouvelle étape avec l’étude du Columbia University publiée dans Neuron, qui montre chez la souris génétiquement vulnérable des troubles digestifs persistants après exposition à l’alpha synucléine. Cette observation s’accorde avec la clinique, où la constipation et d’autres signes non moteurs devancent souvent les symptômes moteurs. L’axe intestin cerveau ne remplace pas l’approche neurologique, il l’enrichit. En attendant les résultats d’essais ciblant la muqueuse et le microbiote, chacun peut soutenir sa santé digestive par des habitudes de vie structurées, adaptées et suivies médicalement. Pour suivre les avancées sur l’alimentation, le microbiome et les pistes de prévention, voir alimentation et santé intestinale et dépistage précoce de Parkinson. Enfin, le lien entre intestin et cerveau rappelle l’importance d’une approche globale, où les symptômes digestifs ne sont pas de simples détails, mais des informations clés pour protéger le cerveau.