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Médecine douceNutrition

Comment l’alimentation stimule ou bloque le cancer de la prostate

Marie Desange

Un apport élevé en gras saturés, retrouvés principalement dans les aliments d’origine animale, stimule la progression des cellules cancéreuses de la prostate.

On le sait déjà, le remplacement des gras saturés par des gras insaturés (en particulier mono-insaturés et polyin-saturés oméga-3) diminue le risque de maladies cardiovasculaires et de mortalité prématurée. Cette protection est due à l’effet opposé de ces deux types de graisses alimentaires sur les taux de cholestérol-LDL. C’est un important facteur de risque d’infarctus et d’AVC. Alors que les gras saturés augmentent la quantité de cholestérol-LDL dans le sang, les gras insaturés diminuent quant à eux les taux de cette forme de cholestérol.

Gras saturé: hausse du cholestérol et des cancers

La majorité des graisses saturées proviennent d’aliments d’origine animale : viande, œufs, produits laitiers. Tandis que les graisses insaturées sont principalement retrouvées dans les végétaux : huiles végétales, noix, certaines graines. Une façon simple d’atteindre un bon équilibre entre l’apport en gras saturés et insaturés est donc d’augmenter l’apport alimentaire en végétaux et de diminuer en parallèle la consommation de produits d’origine animale.

L’effet négatif des gras saturés sur la santé ne se limite pas à une hausse des taux de cholestérol LDL. Plusieurs études ont montré que ces gras possédaient également une action pro-inflammatoire. Ils contribueraient au développement de certaines pathologies graves comme la résistance à l’insuline ou la progression de certains cancers sous forme de métastases.

Stimuler ou bloquer la progression du cancer de la prostate

L’existence d’un lien entre les gras saturés et la progression du cancer est également suggérée par une étude récente. En utilisant un modèle de souris exprimant l’oncogène MYC et génétiquement prédisposées à développer un cancer de la prostate, ces chercheurs ont observé qu’une alimentation enrichie en gras saturés était associée à des modifications majeures du métabolisme des cellules prostatiques. Ce qui menait à l’activation de plusieurs gènes impliqués dans la croissance tumorale. Les animaux nourris avec les gras saturés présentaient des tumeurs plus volumineuses que ceux nourris avec un régime normal. Suggérant fortement que ces gènes activés par les gras saturés participent à la progression du cancer de la prostate.

Il est intéressant de noter que cette activation est réversible. Car une réduction de l’apport en gras saturés annule la hausse de l’expression des gènes et abolit la progression des tumeurs. Un point très important de l’étude est que cette signature génétique, associée à un apport élevé en gras saturés, est également observée chez les patients atteints d’un cancer de la prostate. Les chercheurs ont utilisé les données sur la consommation de gras saturés acquises lors d’études épidémiologiques (Health Professionals Follow-up Study et la Physicians’ Health Study). Ils ont noté que les patients atteints d’un cancer de la prostate qui présentaient la plus grande activation de gènes au niveau de leur cancer avaient quatre fois plus de risque de décéder de leur maladie.

Cette hausse n’est cependant pas observée pour les acides gras insaturés (mono-insaturés et polyinsaturés). Ce qui confirme que c’est l’activation génétique induite par les gras saturés qui est responsable de la progression tumorale.

A 40 ans 1/3 des hommes ont déjà des micro-tumeurs dans la prostate

Une diminution de l’apport alimentaire en gras saturés pourrait ralentir la progression du cancer de la prostate. Mais aussi réduire le risque de mortalité associé aux formes avancées de cette maladie. Il s’agit d’une découverte importante. Car dès l’âge de 40 ans,  le tiers des hommes ont déjà des tumeurs microscopiques de la prostate. Ils sont donc à très haut risque de développer un cancer de cet organe au cours des décennies qui suivent.

Privilégier les gras insaturés d’origine végétale tout en limitant ceux d’origine animale. Cela pourrait donc permettre à ces microtumeurs prostatiques de demeurer dans un état de dormance. Cette orientation alimentaire est une voie prometteuse pour réduire la forte incidence du cancer de la prostate. Avec en prime une meilleure santé cardiovasculaire !

Source

Borén J et coll. Low-density lipoproteins cause atherosclerotic cardiovascular disease: pathophysiological, genetic, and therapeutic insights: a consensus statement from the European Atherosclerosis Society Consensus Panel. Eur. Heart J.février 2020.

Labbé DP et coll. High-fat diet fuels prostate cancer progression by rewiring the metabolome and amplifying the MYC program. Nat. Commun. 2019; 10 : 4358.

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