Plastique des dosettes pour lave-vaisselle : que devient-il ?
Grâce au plastique, les dosettes pour lave-vaisselle évitent de mesurer la quantité de détergent. Mais où va-il après usage ? Dans l’environnement, dans l'organisme ?

Le plastique est omniprésent dans la plupart des cuisines : film étirable, ustensiles jetables, capsules ou tablettes pour machine à laver. Oui, mais où passe le plastique des dosettes pour lave-vaisselle ?
Cette commodité a un inconvénient majeur. Après usage, les plastiques se décomposent souvent en microplastiques qui se retrouvent dans l’environnement et dans l’organisme. Double peine !
Du coup, les fabricants ont essayé de concevoir des films plastiques pour dosettes de lave-vaisselle (ou de machine à laver le linge), appelés alcool polyvinylique ou PVA, qui se dissolvent sans danger.
Malgré cela, certains chercheurs craignent que ceux-ci puissent persister dans l’environnement, s’ajouter aux autres microplastiques et contribuer aux maladies chroniques.
Voici les dernières recherches sur les dosettes pour lave-vaisselle et leurs conséquences.
Quel est ce plastique des dosettes pour lave-vaisselle ?
Les dosettes (capsules ou tablettes), également utilisées pour la lessive, sont enveloppées dans un plastique appelé alcool polyvinylique (PVA).
La production de plastique a doublé au cours des deux dernières décennies, et seulement 9 % de celle-ci est recyclée avec succès. Les microplastiques sont très répandus et nocifs : on en trouve des fosses océaniques, jusqu’à l’alimentation et dans le lait maternel humain.
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Beaucoup plus de recherches sont nécessaires mais plusieurs études soulignent leurs effets toxiques. Une étude a établi des liens entre l’exposition aux microplastiques, en particulier consommés via les aliments, et des dommages pour la santé reproductive, digestive et respiratoire.
Les dosettes pour lave-vaisselle sont parfois regroupées dans la même catégorie que les microplastiques, bien que techniquement elles soient différentes. Également utilisées pour la lessive, elles sont enveloppées dans un type de plastique appelé alcool polyvinylique (PVA) qui est traité pour être soluble dans l’eau et se dissoudre facilement.
Dans le produit final, les films plastiques sont suffisamment résistants pour ne pas se rompre au contact des mains mouillées, mais suffisamment malléables pour que le détergent agisse dans le lave-vaisselle. Les molécules de PVA restantes, une fois dissoutes dans l’eau, ne correspondent plus à la définition des microplastiques : elles sont devenues liquides (et non solides). Le résidu est éliminé par l’eau. Beaucoup de spécialistes considèrent que le risque de toxicité lié à la consommation directe de résidus est faible.
Mais cela ne signifie pas que le PVA a disparu. Il n’est plus visible mais l’eau emporte toujours les molécules de PVA dans les canalisations vers la station d’épuration.
Ce qui se passe, ou ne se passe pas, dans les stations d’épuration est essentiel pour déterminer s’il y a des raisons d’inquiétude.
Que devient le PVA dans les stations d’épuration ?
La plupart des stations d’épuration devraient pouvoir décomposer davantage le PVA et éviter son accumulation dans l’environnement.
- En 2021, des chercheurs belges ont testé ce type de PVA, en suivant les directives internationales d’évaluation des produits chimiques. Ils ont découvert qu’il se dégradait suffisamment pour être sûr en un à deux mois et que le PVA de qualité détergente, grâce à son équilibre entre fermeté dans la main et sa dissolvabilité, permet aux microbes des stations d’épuration de le décomposer plus efficacement que les autres plastiques.
- Les dosettes pour lave-vaisselle sont approuvées par l’Agence américaine de protection de l’environnement qui certifie les produits plus sûrs. Seulement les tablettes contenant de la poudre sont certifiées car les capsules contenant du liquide augmentent le risque d’ingestion accidentelle par les enfants.
- D’autres chercheurs sont sceptiques sur les dosettes pour lave-vaisselle. Les stations d’épuration d’eau américaines sont conçues pour décontaminer uniquement les déchets solides et liquides, et non les autres produits chimiques présents dans l’eau. De nombreuses études suggèrent que le PVA peut passer le traitement des eaux usées sans se dégrader complètement. Tout dépend des températures, des types de communautés microbiennes et d’autres facteurs environnementaux dans les stations.
- Les tests, qui suivent les directives internationales, se déroulent dans un environnement très contrôlé, mais éloignées de certaines conditions réelles, selon Varun Kelkar, ingénieur environnemental qui a étudié les plastiques à l’Arizona State University. Il pense que les molécules pénètrent fréquemment dans les rivières et les océans, où leurs interactions avec la vie marine et d’autres contaminants sont inconnues.
- Dans une étude de 2021, Varum Kelkar et un autre chercheur ont estimé la présence du PVA dans l’environnement et ont constaté qu’il était omniprésent, compte tenu de sa production massive. Ces restes de PVA sont trop dissous pour être définis comme des microplastiques, ce qui est précisément le problème. Durant un moment, le PVA ne s’est pas suffisamment biodégradé et il se transforme en quelque chose impossible à définir.
Il y a certainement des preuves dans la littérature que le film ne se dégrade pas complètement mais d’autres recherches ont montré que les stations d’épuration hébergent naturellement une communauté diversifiée de microbes capables de biodégrader le PVA.
L’avis scientifique n’est donc pas complètement établi : les bactéries dégradent le PVA dans des conditions de laboratoire, jugées moins hospitalières que celles des stations d’épuration.
Les recherches pourraient regrouper le PVA de qualité détergente avec d’autres types de PVA, utilisés dans les engins de pêche et les textiles, par exemple. Comme ceux-ci sont moins hydrosolubles, ils sont plus lents à se décomposer. Mais il serait alors facile de tirer des conclusions hâtives et de faire des projections du pire scénario sur le PVA de qualité détergente si l’on suppose qu’il agit comme d’autres PVA.
Le PVA s’accumule-t-il dans le corps ?
Certaines recherches n’indiquent aucun dommage évident car les molécules dissoutes ne semblent pas s’accumuler à l’intérieur du corps.
Les composés solubles dans l’eau sont moins susceptibles de s’accumuler dans les tissus adipeux.
- En 2022, des chercheurs italiens ont cherché des contaminants dans le lait maternel de 34 femmes et ont observé des plastiques dans 26 échantillons. En examinant diverses qualités des plastiques, seulement 2 % étaient du PVA et aucun ne ressemblait au PVA des doses de détergent (la majorité du plastique provenait de produits courants comme les sacs d’épicerie et les contenants alimentaires.)
- Des scientifiques japonais ont étudié leurs corps à la recherche d’un type de PVA similaire à celui des doses de détergent et les quantités étaient beaucoup trop faibles pour prouver qu’il s’accumule dans les tissus. En 2023, l’agence de protection de l’environnement américaine a cité cette recherche parmi d’autres études en rejetant une pétition de plusieurs organismes à but non lucratif visant à réglementer le PVA de qualité détergente.
- D’autres recherches suggèrent qu’une faible exposition au PVA hydrosoluble peut perturber la croissance des grenouilles et des poissons.
Même si le PVA de qualité détergente ne cause pas de dommages directs, il pourrait transporter d’autres contaminants toxiques, aidant potentiellement leur diffusion dans le corps. La détox des microplastiques au sens large et autres polluants n’est toujours pas élucidée par la science. Heureusement, la structure chimique du PVA le rendrait moins susceptible d’adhérer à des polluants comme les pesticides. L’agence de protection de l’environnement est parvenue à la même conclusion : le PVA hydrosoluble ne se lie pas aux métaux lourds, selon une étude de 2021.
Pourtant, Varum Kelkar et son collègue maintiennent que les doses menacent la santé et l’environnement. Ce n’est pas un matériau toxique en soi mais il pénètre l’environnement à des niveaux élevés. Si de petites quantités ont des effets légèrement négatifs, il faut toujours étudier l’impact cumulatif qui s’élève.
Que retenir de toutes ces informations scientifiques sur le plastique des dosettes pour lave-vaisselle ?
Un dilemme existe entre l’avis des fabricants, plutôt optimistes et de certains chercheurs plutôt sceptiques : pour l’environnement, la question reste ouverte ; pour la santé le risque serait faible.
Impact sur l’environnement
La dégradation est possible, mais n’est pas garantie à 100 % dans tous les systèmes d’eaux usées, ce qui laisse une incertitude sur son accumulation dans la nature.
La principale préoccupation n’est pas tant la toxicité du PVA en soi mais que les grandes quantités produites finissent par saturer l’environnement si les stations d’épuration ne le décomposent pas parfaitement, créant ainsi un problème environnemental cumulatif à long terme.
Impact sur la santé
Le risque de toxicité ou d’accumulation directe du PVA des doses dans le corps est jugé faible par la majorité des experts.
Le risque dans les tissus est très limité, le PVA ne se lie pas avec d’autres contaminants (pesticides ou métaux lourds) et les preuves de présence de PVA dans l’organisme très réduites.
Comment réduire l’apport quotidien ?
La meilleure chose est d’utiliser moins de plastique : éviter les doses pour lave-vaisselle et utiliser un détergent liquide emballé dans de l’aluminium recyclable.
Le plastique est fabriqué à partir de produits pétrochimiques et les entreprises de ce secteur augmentent leur production de plastique pour compenser la baisse des ventes de pétrole et de gaz. Elle devrait doubler, voire tripler, d’ici 2050, malgré les risques avérés pour la santé et l’environnement.
Dans un monde rempli de plastique, il est difficile d’éliminer toute exposition. Il est conseillé de limiter le plastique qui touche les aliments car ils sont une voie d’entrée dans l’organisme.
Plutôt que de stresser à propos de tous les plastiques toxiques dans l’environnement, on peut se concentrer sur la réduction de la consommation de microplastiques en utilisant des contenants et ustensiles en bois et en métal.
À l’intérieur du lave-vaisselle, des cuves ou des paniers en plastique pourraient libérer des microplastiques dans le système d’eau (les lave-vaisselle haut de gamme peuvent être livrés avec des cuves en acier inoxydable mais la plupart des paniers ont un revêtement en plastique.)
Le même problème s’applique pour le lavage au lave-vaisselle de contenants en plastique, un risque potentiellement plus grand que celui des dosettes.
Faudrait-il aussi abandonner le lave-vaisselle ? Peut-être pas mais l’utiliser avec modération ?