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LES GRAISSES : DE REMARQUABLES ALLIÉES OU DE REDOUTABLES ENNEMIES

Hélène Leroy

Obésité, cholestérol, maladies cardio-vasculaires, stimulateur de l’inflammation, troubles de l’image et de l’estime de soi, de nos jours, les graisses alimentaires font lourdement sentir leur poids sur notre santé. Pourtant indispensables au bon fonctionnement de l’organisme et en particulier aux échanges cellulaires, au système nerveux, ou au fonctionnement cérébral, il est maintenant plus que jamais nécessaire de faire le trie dans les lipides que l’on absorbe. Car si certains sont clairement nuisibles, d’autres participent à la prévention contre le cancer, à l’amélioration de la réponse aux traitements et à un meilleur état d’esprit.

Si nécessaires à l’origine, si nuisibles maintenant

Indispensables à l’organisme, de sources animales ou végétales, les graisses sont des éléments fondamentaux de notre équilibre et de notre santé. Mais les équilibres alimentaires sont fragiles, un excès de certains types de graisses pourraient bien faire le lit de pathologies lourdes.

Les matières grasses, ou lipides, sont indispensables au fonctionnement de l’organisme, et font partie de l’alimentation humaine depuis toujours. On les trouve en effet dans plusieurs sources alimentaires animales : beurre, lait crème, fromage, viandes, poissons, et sources végétales : huiles, margarines. Elles agissent dans l’organisme à différents niveaux, par exemple en fournissant de l’énergie, en contribuant à la régulation de la température corporelle, ou la synthèse des hormones et à la fertilité. Elles apportent des acides gras essentiels que le corps ne peut fabriquer, permettent l’absorption de certaines vitamines : A, D, E et K, procurent un sentiment de satiété ou rehaussent la saveur et la texture de certains aliments.

Mais voilà, depuis les années soixante, l’augmentation croissante de la consommation de plats préparés, de margarines, de sauces industrielles, de pâtisseries, etc.. ainsi que le bouleversement de l’alimentation des animaux d’élevage destinés à la consommation ont bouleversé les équilibres dans les lipides alimentaires que nous consommons. Petit à petit les déséquilibres ont commencé à se manifester sur la santé humaine et à se mesurer en terme d’obésité, de maladies cardio-vasculaires ou d’augmentation des cas de cancer.

Les graisses qui protègent et celles qui nuisent 

C’est que les graisses jouent un rôle dans la genèse et la prolifération du cancer. Ou plutôt, certaines graisses, telles les oméga-6 ou les gras trans, maintenant très largement abondantes dans nos produits de consommation, agissent comme des stimulateurs de l’inflammation dans l’organisme, facilitant ainsi le déploiement des cellules anormales.
L’obésité est le second facteur de risque de développer un cancer. Non pas que les cellules adipeuses soient un risque, mais les mécanismes et les causes qui ont menés à stockage de ces cellules et au surpoids sont les mêmes qui mènent, à un moment ou à un autre, à favoriser le déploiement d’un cancer dans l’organisme. Les bonnes graisses et les mauvaises graisses ne sont pas tant celles qui font grossir ou aident à garder la ligne mais sont celles qui favorisent les cancers et les maladies cardio-vasculaires ou celles qui en protègent.

 

Le point sur les différentes graisses

La grande famille des graisses compte plusieurs représentants. Si l’on entends souvent parler de bonnes et de mauvaises graisses dans le cadre de régimes, ici, les bonnes et mauvaises graisses seraient plutôt celles qui protègent l’organisme et celles qui lui nuisent.

Acides gras mono ou poly insaturés, saturés, trans, les graisses sont une grande famille. Certaines vous veulent du bien, d’autres sont maintenant reconnues dans le monde comme des promoteurs de pathologies lourdes. Le cholestérol étant bien le moins pire de la liste.

Acides gras insaturés : bénéfiques et nécessaires

Ces gras se divisent en deux groupes, soit les gras mono-insaturés et les gras polyinsaturés.

Les acides gras polyinsaturés (oméga-6 et oméga-3) sont liquides à la température ambiante et ne figent pas lorsqu’ils sont réfrigérés.
Les graines de lin et de chanvre, les noix et les huiles qu’on en tire sont particulièrement riches en gras de type oméga-3. Elles ne doivent surtout pas être chauffées si on veut préserver ces fragiles acides gras. Les poissons gras et les huiles qu’on en tire sont également de bonnes sources d’oméga-3, mais d’un type différent de celui des végétaux. Les gras oméga-3 ont un effet protecteur reconnu sur la fonction cardiovasculaire, sur le traitement de la dépression et pour leur potentiel modérateur de l’inflammation.
Les principales sources d’acides gras de type oméga-6 sont les huiles de maïs, de soja et de tournesol. Ces huiles résistent mal aux hautes températures et devraient être réservées à la cuisson au four. Les acides gras oméga-6 sont aussi considérés comme de bons gras, car ils ont un impact positif sur les taux de lipides sanguins, mais en excès, ils empêchent l’utilisation optimale des oméga-3 par l’organisme et sont pro-inflammatoires. Le rapport oméga-6/oméga-3 dans l’alimentation occidentale est de 10/1 à 30/1, tandis qu’il devrait être, idéalement, de 1/1 à 4/1.

La principale source d’acides gras monoinsaturés, aussi appelés oméga-9, est l’huile d’olive. D’autres sources comme les noix, les arachides et l’avocat en renferment aussi de bonnes quantités. Ils sont liquides à température ambiante, et supportent bien la chaleur : on peut donc les utiliser pour la cuisson. Considérés comme de « bons gras », les lipides monoinsaturés ont des effets bénéfiques reconnus sur la fonction cardiovasculaire notamment. Mais plus généralement, ils doivent faire partie de l’équilibre lipidique dans l’alimentation courante.

Acides gras saturés : indispensables aux membranes cellulaires

Qu’ils proviennent du règne animal (beurre, crème, graisse de porc, graisse d’oie, de canard, etc.) ou végétal (huile de noix de coco, huile de palme), les lipides saturés se présentent sous forme solide à la température ambiante. Ils sont généralement moins fragiles que les acides gras insaturés, supportent mieux la chaleur et sont moins susceptibles de rancir. Bien qu’ils aient mauvaise réputation parce qu’on les associe à la formation du cholestérol sanguin, ils apportent tout de même leur contribution à l’alimentation des humains depuis la nuit des temps. Bien qu’on doive éviter de trop en consommer, les gras saturés ont leur place dans l’alimentation humaine. Ils sont notamment des constituants importants des membranes cellulaires.

Gras trans : les pires

C’est un type de gras fabriqué par l’industrie qui présente de nombreux avantages techniques et commerciaux mais qui a les pires effets sur la santé. Le gras trans , ou en terme technique, l’hydrogénation d’huiles, est un procédé industriel qui modifie la configuration des molécules d’acides gras insaturés. On obtient ainsi des gras trans qui permettent de confectionner, à partir d’huiles végétales insaturées (le plus souvent de soja ou de maïs), des margarines plus ou moins solides à la température ambiante. De plus, ces produits ont une longue durée de conservation.

Les gras trans : les interdictions se multiplient, à juste titre

Canada, Danemark, Californie, les uns à la suite des autres, les états légifèrent pour interdire l’utilisation des gras trans dans la préparation des plats préparés, de la pâtisserie, des margarines, ou d’une foule de produits de consommation courante. Présents à l’état naturels, les gras trans de synthèse sont maintenant partout, mieux vaut lire les étiquettes.

Interdits récemment dans plusieurs pays comme le Danemark, le Canada ou la Californie, les gras trans commencent à apparaître au grand jour pour ce qu’ils sont : des ennemies de la santé. Si l’invention de l’hydrogénation des huiles a été une avancée technologique au début du siècle dernier, maintenant qu’ils sont généralisés dans l’alimentation préparée, ils sont une grande régression pour la santé.
La technologie permettant de solidifier l’huile, l’hydrogénation, pour en faire de la margarine a été découverte par le chimiste français Paul Sabatier, en 1902, à l’époque le beurre était une denrée rare et chère. Ce procédé permettait de fabriquer des graisses qui présentent l’avantage de rester solides à température ambiante et de se conserver longtemps. Avantages appréciables dans un contexte où les aliments voyagent beaucoup et peuvent séjourner de longues périodes en conteneurs ainsi que dans les entrepôts et sur les étalages des magasins. Après la deuxième guerre mondiale, une technique baptisée « hydrogénation partielle » permettra aux margariniers d’utiliser des huiles plus insaturées, par exemple celles de maïs et de soja (oméga-6 !).

Quelques effets certains : cholestérol et maladies cardio-vasculaires

Tout comme les gras saturés en excès, les gras trans font augmenter les taux sanguins de LDL (« mauvais cholestérol ») tout en abaissant les taux de HDL (« bon cholestérol »). Cela a pour effet d’augmenter significativement le risque de souffrir de troubles cardiovasculaires. Les gras trans pourraient faire augmenter ce risque de l’ordre de 132 % en comparaison de 32 % pour les gras saturés.
Tant qu’on s’en tenait aux gras trans naturels, qui ne se retrouvent qu’en petites quantités dans la nature, les risques pour la santé étaient pratiquement inexistants. Mais l’omniprésence des gras trans synthétiques dans les produits alimentaires transformés inquiètent les autorités sanitaires. Il est estimé qu’au-delà d’un certain seuil (10 g de gras trans par 100 g de matières grasses, soit 10 %), nous pourrions augmenter le risque d’être affecté par des troubles cardiovasculaires. On estime qu’en Occident, la consommation quotidienne de gras trans est en moyenne de 38,7 g. Ces gras trans proviennent à 90 % ou à 95 % des huiles hydrogénées.

Regardez les étiquettes

On trouve les gras trans dans les margarines, les plats préparés, les confiseries, les biscuits, les viennoiseries, les pâtes à tarte, les pâtes à tartiner, les chocolats commerciaux, les pâtisseries , les céréales, les barres chocolatées ou céréales, le beurre d’arachide, les plats préparés. Lorsque la liste des ingrédients comprend les termes « huiles végétales hydrogénées » ou « partiellement hydrogénées », on sait que le produit renferme des gras trans. Leur position dans la liste d’ingrédients est également un indicateur de quantité : plus ils se rapprochent du début de la liste, plus il y a de gras trans dans le produit.

Cocktail de gras trans et d’omega-6, on peut pas faire pire pour la santé

Les effets catastrophiques des gras trans sur la santé conjugués à l’excès d’omega-6 donnent un cocktail pro-inflammatoire favorisant la promotion des cellules cancéreuses dans l’organisme.
L’excès d’oméga 6 dans le corps engendre des réactions inflammatoires un peu partout et cet état inflammatoire persistant laisse penser qu’il y aurait un lien direct avec l’augmentation statistique forte des nos maladies de « civilisations » que sont les maladies cardio-vasculaires comme l’infarctus ou l’accident vasculaire cérébrale, les cancers, l’arthrite ou même la maladie d’Alzheimer. De même les maladies en « ite », type, : bronchite, rhinite, tendinite, etc… tous ces cas sont des inflammations d’un organe ou d’une partie du corps, et lorsqu’ils deviennent , non plus ponctuels comme cela peut arriver dans la vie courante, mais chroniques, alors, on peut penser que c’est le terrain pro-inflammatoire qui favorise la récidive d’une pathologie qui ne devrait être qu’occasionnelle. Ce statut inflammatoire permanent est renforcé par les mêmes effets qu’occasionnent les omaga-6. Le couple infernal sévit alors avec une puissance redoublée.

Favoriser la prolifération

Pour bien prendre la mesure des effets physiologiques désastreux et pro-cancer qu’engendrent la forte consommation d’oméga 6 et de gras trans, il faut revenir à la genèse des cancers. Nous portons tous des cellules cancéreuses et initions tous des cancers au cours de notre vie. La plupart du temps, ces cellules anormales naissantes sont pourchassées et détruites par notre système immunitaire. Pour qu’un cancer se développe et passe à la phase de promotion, il faut beaucoup de temps et un environnement favorable permettant l’éclosion puis la dissémination des cellules cancéreuses.
Et bien les gras trans et les gras oméga-6 contribuent à créer et entretenir ce climat inflammatoire très favorable au développement du cancer. En créant une inflammation chronique et en entrant en compétition avec les oméga-3, réduisant leur effet modérateur de l’inflammation, ils assurent des conditions favorables à la promotion de cellules cancéreuse. Les oméga 6 et les gras trans entrent en effet en compétition avec les oméga 3 et en gênent l’absorption en monopolisant les enzymes spécifiques à leur métabolisation, certaines vitamines, notamment B6,B3,C et E ainsi que des minéraux.

Rééquilibrer l’apport des gras

Dans la revue scientifique « International Journal of cancer », le chercheur Philippe Bougnoux, directeur de l’unité de recherche de l’INSERM « Nutrition, croissance et cancer » a publié une étude montrant que la supplémentation en gras polyinsaturés augmentait chez les rats la sensibilité aux traitement de radiothérapie et de chimiothérapie sur des tumeurs mammaires. Un régime riche en oméga 3 a été associé à une régression de 60% de la taille des tumeurs douze jours après le début de la radiothérapie contre 31% de diminution dans le groupe témoin.

 Remplacer, équilibrer, choisir

Comme un light motif, la consommation abondante, raisonnée, en prévention ou en accompagnement, de gras omega 3 revient avec d’autant plus de force qu’elle peut contrer les effets négatifs des gras oméga-6 et gars trans. Une simple réévaluation des éléments de base de son alimentation peut changer toute la donne. Quelques réflexes alimentaires en compléments seront également très utiles.
Il n’est plus nécessaire de mentionner toutes les vertus santé des acides gras omaga-3. Que ce soit en prévention ou en accompagnement des traitements, une alimentation riche en ce type d’acide gras aura un impact nettement positif sur tous les marqueurs. Alors, en guise de rappel, voici une courte liste des aliments à privilégier :

Les aliments riches en oméga-3
dans l’alimentation
100 g de sardine = 3,3 g d’oméga-3
100 g de maquereau = 2,5 g
100 g de thon = 1,5 g
100 g de saumon = 1,5 g
100 g de crevettes = 0,5 g
100 g de crabe = 0,4 g
100 g de homard = 0,2 g
15 ml (1 c. à soupe) d’huile de lin = 7,5 g
15 ml de graines de lin = 1,9 g
15 ml d’huile de soja = 0,9 g
2 oeufs oméga-3 = 0,5 g
15 ml de noix = 0,4 g

Quelques réflexes complémentaires utiles contre les mauvaises graisses

Consommez les gras les moins transformés, privilégiez les huiles pressées à froid et n’oubliez pas qu’elles sont fragiles : dès qu’on les chauffe, elles perdent une partie de leurs qualités. Elles sont également très sensibles à la lumière, notamment les huiles oméga-3 (ex : huile de lin), on peut ainsi protéger ses bouteilles d’huile en les mettant dans un placard ou en les recouvrant d’une feuille d’aluminium. L’huile d’olive (oméga-9) est aussi à privilégier, composante majeure du régime méditerranéen, elle assaisonne très bien les entrées.

Évitez les aliments frits et lorsque vous faites sauter vos aliments, allez-y doucement : saisissez les rapidement et ne laissez pas les aliments noircir. Par exemple, des oignons transparents, oui, brunis par un excès de chaleur, non. Lorsqu’un aliment change de couleur, il y a généralement une perte de valeur nutritive.
Un apport journalier de 1 000 mg d’omega-3 permettrait d’atteindre le taux optimal pour l’organisme. Cette valeur n’est pas une recommandation, mais donne juste une idée de la quantité de bons gras qu’il faudrait atteindre dans l’alimentation pour commencer à bénéficier des leurs vertus.

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