La déshydratation est un problème de santé courant chez les adultes âgés, touchant 20 à 30 % de cette population. Bien qu’elle puisse avoir des causes diverses, comme une perte excessive d’eau due à la diarrhée, aux vomissements ou à la transpiration, elle résulte le plus souvent d’un apport hydrique insuffisant. Or, l’eau joue un rôle essentiel dans le fonctionnement de l’organisme, participant à la production d’énergie, à l’optimisation des fonctions cérébrales, à la régulation de la température corporelle, à l’élimination des toxines et à la lubrification des articulations.
Symptômes et signes de déshydratation chez les personnes âgées
Les personnes âgées présentent des signes spécifiques de déshydratation qu’il est important de savoir identifier.
Habitudes urinaires
La constipation ou les efforts importants lors de la défécation sont des signes courants de déshydratation, l’eau ayant un effet ramollissant sur les selles. Lorsqu’une personne est déshydratée, son urine devient jaune foncé, indiquant une plus grande concentration. Une diminution de la fréquence des mictions ou du volume urinaire sont également des symptômes fréquents. Cependant, la présence ou l’absence de ces symptômes urinaires n’est pas un moyen fiable de diagnostiquer une déshydratation chez les personnes âgées.
Changements cognitifs, de l’humeur et du comportement
Les performances cognitives sont affectées dès qu’il y a une perte de plus de 2 % de l’eau corporelle. Les domaines les plus touchés sont l’attention, les fonctions exécutives (capacité à se concentrer et à suivre des instructions), la coordination motrice (comme pour se brosser les dents ou boutonner une chemise) et la mémoire à court terme.
La déshydratation peut également avoir un impact sur l’humeur. Ainsi, des adultes buvant habituellement de grandes quantités d’eau (2 litres ou plus par jour) ont rapporté une diminution de leurs sentiments de bien-être, de calme, d’émotions positives et de vitalité après avoir réduit leur consommation d’eau. De même, chez les personnes âgées, la malnutrition associée à une faible consommation de liquides a été liée à de la dépression, de l’irritabilité, de l’apathie, ainsi qu’une diminution de l’ambition et de la discipline personnelle.
Effets musculaires
La déshydratation chez les personnes âgées est associée à une fonte musculaire, le corps privilégiant l’utilisation des protéines musculaires comme source d’énergie plutôt que les glucides ou les lipides. Elle peut également entraîner des déséquilibres électrolytiques (sodium, potassium, calcium), combinaison qui peut causer faiblesse musculaire, douleurs, crampes, tremblements et spasmes.
Autres symptômes
Parmi les autres symptômes potentiels de déshydratation, on peut citer :
- Sécheresse des lèvres et de la langue due à une diminution de la production de salive
- Fatigue liée à la réduction de la teneur en eau des tissus de l’organisme
- Perte de poids due à la perte d' »eau corporelle »
- Maux de tête, probablement causés par l’activation des récepteurs de la douleur dans les tissus entourant le cerveau (méninges)
Déshydratation sévère
Dans les cas les plus graves de déshydratation, une hypernatrémie (taux élevé de sodium dans le sang) ou un choc hypovolémique peuvent se développer.
L’hypernatrémie, souvent causée chez les personnes âgées par une très mauvaise prise de liquides sur une longue période, se manifeste par de la faiblesse, de l’irritabilité, pouvant aller jusqu’aux convulsions, au coma et potentiellement au décès.
Le choc hypovolémique, quant à lui, se caractérise par une chute importante de la pression artérielle, empêchant une oxygénation adéquate des organes vitaux. Ses symptômes incluent une mauvaise élasticité de la peau, une peau fraîche, un rythme cardiaque et respiratoire rapide, une absence de miction, de la confusion et des étourdissements voire des évanouissements.
Comorbidités et impact sur la déshydratation chez les personnes âgées
Les personnes âgées sont plus vulnérables à la déshydratation pour diverses raisons liées à l’âge et à leur état de santé.
Liées à l’âge
Avec le vieillissement, le risque de déshydratation augmente en raison de :
Une diminution de la sensibilité à la soif
Une réduction de 10 % de la teneur totale en eau de l’organisme due à la perte de masse musculaire
Une diminution de la capacité des reins à retenir l’eau
Une moindre aptitude à supporter le stress thermique
La prise de médicaments favorisant la perte d’eau, comme les diurétiques ou les laxatifs
Liées à l’état de santé
Les personnes âgées ont également plus de risque de souffrir de pathologies comme le diabète ou une hypertrophie de la prostate, pouvant les conduire à se lever la nuit pour uriner, les incitant à boire moins pour ne pas perturber leur sommeil. Celles souffrant d’incontinence urinaire sont aussi enclines à la déshydratation, restreignant leur consommation de liquides par crainte d’accidents.
Les problèmes de mobilité ou les maladies articulaires sévères, comme l’arthrose, peuvent aussi rendre l’accès à l’eau difficile.
La démence, un facteur de risque majeur
La démence, qui regroupe diverses affections comme la maladie d’Alzheimer ou la démence vasculaire, est fortement liée à l’âge. Elle peut conduire les personnes à oublier de boire ou à avoir du mal à exprimer leur soif à leurs aidants. Ses effets psychologiques, comme la dépression, l’apathie ou l’agitation, peuvent également limiter leur participation aux repas ou aux activités où des boissons sont servies. La démence peut aussi altérer leur sens de l’odorat et du goût, ainsi que leurs capacités de déglutition, nuisant à une hydratation adéquate.
Les personnes atteintes de démence ont ainsi 10 fois plus de risque d’être hospitalisées pour déshydratation que les adultes du même âge sans démence.
Déshydratation chronique chez les personnes âgées
On distingue deux types de déshydratation : aiguë et chronique.
La déshydratation aiguë résulte généralement de facteurs transitoires comme une perte excessive d’eau due à une infection (forte fièvre, vomissements, diarrhée abondante) ou à une transpiration intense.
La déshydratation chronique, quant à elle, survient lorsque l’apport en eau est insuffisant pour compenser les pertes sur une période prolongée. Ses symptômes et signes peuvent être plus subtils que ceux de la forme aiguë.
Chez les personnes âgées, la déshydratation chronique est associée à divers problèmes de santé graves, comme les chutes, la constipation, les infections urinaires, une dégradation des performances mnésiques et un risque accru d’hospitalisation.
De plus, lorsqu’une personne âgée (65 ans et plus) est hospitalisée pour une autre raison, la déshydratation peut aggraver le pronostic de la pathologie traitée.
Prise en charge de la déshydratation
Le traitement de la déshydratation vise à restaurer le contenu en eau perdu. Les personnes âgées présentant une déshydratation légère peuvent généralement se réhydrater à domicile.
Les cas de déshydratation sévère nécessitent une hospitalisation avec perfusion intraveineuse de liquides et, parfois, d’autres mesures selon la cause sous-jacente.
À domicile
La réhydratation à domicile consiste à boire fréquemment de petites quantités d’eau contenant des électrolytes comme le sodium et le potassium. Des solutions de réhydratation orale (SRO) sont disponibles en pharmacie ou en supermarché. Elles diffèrent des boissons de sport (Gatorade) car elles contiennent la juste quantité d’électrolytes nécessaire à la réhydratation.
Il est crucial de consulter aux urgences si les symptômes persistent malgré la prise de liquides. De même, il faut contacter un professionnel de santé si la cause de la déshydratation (vomissements, diarrhée) persiste, car des médicaments peuvent être nécessaires.
Soins médicaux d’urgence
Il faut appeler les secours ou se rendre aux urgences en cas de :
Confusion ou somnolence
Fatigue ou faiblesse sévères
Étourdissements et/ou évanouissements
Incapacité à boire des liquides en raison de problèmes de déglutition ou de vomissements
Absence de miction
En milieu médical
Les solutions de réhydratation orale et les perfusions intraveineuses sont administrées en fonction du poids corporel, le statut hydrique étant étroitement surveillé (couleur et concentration des urines, fréquence cardiaque, tension artérielle, variation de poids).
Prévention de la déshydratation chez les personnes âgées
Les recommandations en termes d’apport hydrique sont de 1,6 litre par jour pour les femmes et 2 litres pour les hommes. Cependant, ces chiffres ne sont pas une règle absolue, les besoins pouvant être inférieurs ou supérieurs selon l’état de santé et le niveau d’activité.
Voici quelques conseils pour prévenir la déshydratation chez les personnes âgées :
- Boire fréquemment de petites quantités d’eau, de thé ou de jus de fruits (dilués à l’eau) tout au long de la journée
- Consommer des aliments hydratants comme les concombres, les céleris, la laitue iceberg, les fraises ou la pastèque
- Prendre les repas en compagnie pour encourager une hydratation et une nutrition adéquates
- Boire davantage en cas d’activité physique ou de forte chaleur
- Dans les établissements de soins de longue durée, d’autres mesures peuvent être mises en place :
- Organiser des « rondes de boissons » régulières et fréquentes dans la journée
- Encourager une meilleure hydratation lors de la prise de médicaments
- Garantir un accès sûr et facile aux toilettes et un soutien disponible
Tenir compte des préférences individuelles en termes de boissons et de présentation (eau pétillante aromatisée dans une tasse favorite, par exemple)
La déshydratation, causée par un apport hydrique insuffisant ou une perte excessive d’eau, est un problème fréquent chez les personnes âgées. Celles-ci y sont plus vulnérables en raison de l’affaiblissement de la sensation de soif, des effets secondaires médicamenteux et de pathologies comme le diabète ou la démence.
Les signes de déshydratation incluent la constipation, les urines foncées, les difficultés de concentration, l’irritabilité, les crampes musculaires, la sécheresse buccale, la fatigue et la perte de poids. Dans les cas les plus graves, elle peut entraîner un choc hypovolémique potentiellement fatal.
Bien que la déshydratation légère puisse généralement être traitée à domicile avec des solutions de réhydratation orale, les cas sévères nécessitent une hospitalisation avec perfusion intraveineuse. La prévention passe par une hydratation régulière, l’adaptation des soins en établissement et une surveillance accrue des personnes à risque, comme celles atteintes de démence.