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Le poisson : tellement contaminé qu’il ne faut plus en manger ?

Hélène Leroy

Pour certaines personnes, manger régulièrement du poisson est un véritable dilemme : d’un côté, on sait que les poissons sont bons pour la santé car ils sont riches en éléments nutritifs et en gras oméga-3 essentiels. D’un autre côté, on s’interroge souvent sur les effets néfastes de certains contaminants qu’ils contiennent. Que penser ? Une étude menée à l’Université Harvard vient de confirmer que les bienfaits sur la santé associés au poisson sont de loin supérieurs aux risques encourus.

La plupart des poissons, plus particulièrement les poissons gras comme le saumon, les sardines ou le maquereau, contiennent de grandes quantités de EPA et DHA, deux acides gras oméga-3 à longues chaînes qui sont essentiels à notre organisme.

Plus particulièrement, ces gras jouent un rôle très important dans la prévention de certaines maladies cardiovasculaires : par exemple, les grands consommateurs de poissons comme les Japonais, qui absorbent en moyenne près de un gramme de EPA et de DHA par jour, ont une mortalité causée par les maladies coronariennes près de 90 % plus faible que celle des habitants des régions où on mange peu de poisson, comme en Amérique du Nord.

L’étude de l’Université Harvard suggère que l’effet protecteur de ces gras peut même être observé à des quantités moins importantes : ainsi, une consommation modeste d’environ 250 à 500 mg de EPA et de DHA par jour, ce qui équivaut à peine à une demi-portion de saumon, réduit d’environ 40% le risque de mortalité due aux

maladies coronariennes. Et cet effet positif ne se fait pas attendre : certaines études ont  montré que la consommation régulière de poisson provoque en quelques semaines des effets positifs sur le cœur en diminuant les épisodes d’arythmie, une pathologie qui est souvent responsable des morts subites.

Mercure et  BPCS: le poisson tellement plombé qu’il ne faut pas en manger?

En dépit des multiples effets bénéfiques associés à la consommation de poisson, plusieurs personnes ont tenté de discréditer cette source alimentaire sous prétexte que les espèces aquatiques contiennent de trop grandes quantités de produits toxiques. Examinons les deux grands types de contaminants environnementaux qui peuvent être retrouvés, à des niveaux variables, dans les poissons qui nous sont offerts à l’épicerie : le mercure et les biphényl polychlorés (BPC).

Le méthylmercure: privilégiez les petits poissons

Le mercure est un métal lourd qui peut provenir de sources naturelles (par exemple des volcans) ainsi que de l’activité humaine (par exemple des centrales électriques au charbon). Lorsqu’il se retrouve dans l’eau, le mercure est transformé en méthylmercure, une forme qui lui permet de s’accumuler dans les espèces aquatiques. La concentration de méthylmercure dans les poissons est cependant très variable, car elle dépend non seulement de la contamination environnementale, mais également de la durée de vie du poisson.

Par exemple, les gros poissons prédateurs qui vivent longtemps, comme le requin et l’espadon, mangent au cours de leur vie beaucoup d’espèces aquatiques qui peuvent contenir du méthylmercure, ce qui peut entraîner une accumulation au fil des années.

À l’inverse, des poissons qui ont une durée de vie plus courte, comme le saumon ou les sardines, n’ont pas le temps d’accumuler les substances toxiques de façon significative et n’en contiennent donc que très peu.

Le principal effet néfaste du mercure affecte le fœtus et on recommande donc aux femmes enceintes d’éviter de manger de l’espadon, du requin ainsi que du grand maquereau, et de les remplacer par des poissons peu contaminés, comme le saumon. De cette façon, les fœtus pourront profiter des effets positifs des oméga-3 sur le développement du cerveau, surtout durant le dernier trimestre de la grossesse, sans avoir à subir les effets néfastes possibles du mercure.

Les BPCS : pas plus dans le poisson que dans d’autres aliments courants

Interdits d’utilisation depuis 1977, les BPCs ont cependant une longue durée de vie et sont encore présents dans notre environnement. Même si le discours actuel insiste beaucoup sur la présence de BPC dans le poisson, il est important de savoir que les niveaux de BPC des différents poissons sont comparables à ceux retrouvés dans plusieurs autres aliments que nous mangeons quotidiennement.

Par exemple, le saumon d’élevage contient environ 30 nanogrammes de BPC par gramme (30 ng/g), une quantité similaire à celle présente dans le poulet (32 ng/g), le bœuf (22 ng/g), le beurre (70 ng/g), ou encore les œufs (19 ng/g). Ces quantités sont toutes bien en deçà de la limite imposée par les organismes de contrôle gouvernementaux (2000 ng/g par jour).

Plus d’effets bénéfiques pour la santé que de risques

Avec une réduction aussi marquée de la mortalité due aux maladies coronariennes, les bénéfices associés à la consommation régulière de poisson sont de loin supérieurs aux effets négatifs possibles de leurs contaminants. Il est donc beaucoup plus dangereux de ne pas manger de poisson que d’en manger régulièrement ! On n’a qu’à penser aux Japonais, qui consomment beaucoup plus de poisson que nous tout en possédant la plus grande espérance de vie du monde!

Les poissons qui contiennent le plus de mercure, c’est-à-dire l’espadon, le requin ou encore le grand maquereau, sont des espèces très peu populaires chez nous et donc très faciles à éviter. À l’inverse, le saumon, les sardines ou encore le maquereau de l’Atlantique, tous des poissons au contenu exceptionnel en gras oméga-3, ne contiennent que des traces de mercure et peuvent être consommés régulièrement de façon à profiter de leurs multiples effets positifs sur la santé.

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