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Médecine douce

Arrêt du tabac : comment éviter la prise de poids ?

Hélène Leroy

Les trois quarts des personnes qui cessent de fumer prennent du poids au cours des mois qui suivent l’arrêt, même lorsque leur apport calorique demeure stable. Ces kilos en trop seraient causés par une modification majeure de la flore intestinale qui améliore l’absorption de l’énergie contenue dans la nourriture.

 

Les fumeurs sont souvent plus minces que les personnes qui ne fument pas en raison des nombreux effets de la nicotine du tabac sur le métabolisme, comme une baisse de l’appétit, l’inhibition d’enzymes impliquées dans l’assimilation des graisses et une augmentation de la dépense énergétique du corps.

 L’arrêt du tabac fait prendre entre 3 et 10 Kg

Ces impacts métaboliques font en sorte qu’il est très fréquent que les personnes prennent du poids après l’arrêt du tabac: 80 % des ex-fumeurs prennent de trois à quatre kilos dans la période qui suit leur dernière cigarette, ce surplus pouvant même être supérieur à 10 kilos chez certains. Ce gain de poids potentiel représente pour plusieurs personnes, en particulier les jeunes femmes, un facteur important dans la décision de continuer ou encore de recommencer à fumer. Il s’agit d’une très mauvaise stratégie de contrôle du poids corporel étant donné les nombreux effets catastrophiques du tabac sur la santé! Une meilleure compréhension des facteurs impliqués dans la prise de poids à la suite de l’arrêt du tabac revêt donc une grande importance pour améliorer l’efficacité des stratégies antitabac.

 

Ex-fumeurs et obèses : une flore intestinale identique

Une augmentation de l’appétit et de l’apport calorique suite au sevrage de la nicotine est généralement pointée du doigt pour expliquer la prise de poids chez les ex-fumeurs, surtout s’ils adoptent des mauvaises habitudes alimentaires pour compenser le manque de tabac. C’est sans doute vrai pour certains, mais il est bien documenté qu’un grand nombre d’ex-fumeurs grossissent de plusieurs kilos sans pour autant avoir modifié leur alimentation, et même parfois malgré une diminution de leur apport calorique. Comment expliquer qu’un nombre constant ou même inférieur de calories puisse être associé à un gain de poids?

Pour répondre à cette question, une équipe de chercheurs suisses s’est penchée sur le rôle potentiel de la flore intestinale. Ces bactéries dégradent les substances que nous sommes incapables de digérer par nous-mêmes (les fibres alimentaires, par exemple), et l’énergie ainsi relâchée est par la suite assimilée par le corps. Il s’agit d’un phénomène d’une grande importance: par exemple, des études ont montré que la population de bactéries présentes dans l’intestin de personnes obèses était plus efficace à extraire l’énergie contenue dans la nourriture et contribuait par le fait même à la surcharge calorique. Pour déterminer si un phénomène similaire était à l’œuvre chez les ex-fumeurs, les chercheurs ont analysé la composition de leur flore bactérienne et l’ont comparée à celle des fumeurs.

Ils ont tout d’abord remarqué que le tabagisme était associé à une réduction marquée de la diversité de la flore microbienne, ce qui pourrait expliquer l’impact négatif connu du tabac sur les maladies inflammatoires de l’intestin. Par contre, ils ont observé que l’arrêt du tabac était associé à des modifications remarquables dans la composition de cette flore, la proportion des différentes bactéries qui la composent se rapprochant de celle retrouvée chez les personnes obèses. Il semble donc que l’arrêt du tabac favorise la mise en place d’une flore plus apte à extraire l’énergie contenue dans la nourriture, ce qui pourrait expliquer la prise de poids chez les ex- fumeurs.

Arrêt du tabac sans prise de poids

La découverte du rôle important de la flore intestinale dans la prise de poids des ex-fumeurs suggère que l’adoption d’habitudes alimentaires reconnues pour influencer la composition et la diversité de cette flore pourrait permettre de réduire ce gain de poids. En ce sens, une alimentation riche en fibres (fruits, légumes, grains entiers) et faible en gras et sucre industriel est possiblement la meilleure stratégie à adopter pour permettre le fonctionnement optimal de la flore.

Il faut garder en tête que les bénéfices qui découlent de l’arrêt du tabagisme sont tellement importants que la crainte de prendre quelques kilos ne devrait pas représenter un facteur limitant dans la décision d’arrêter de fumer!

Le tabac demeure la première cause de mortalité.

Source

Biedermann L et coll. Smoking cessation in- duces profound changes in the composition of the intestinal microbiota in humans. PLoS One; 8: e59260.

Cotillard A et coll. Dietary intervention impact on gut microbial gene richness. Nature; 500: 585-8.

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